…ou pourquoi le patient est-il le meilleur spécialiste de son problème…et ses solutions ?
Les principes de base qui fondent l’approche orientée vers la solution (ou thérapies orientée vers la solution) peuvent sembler triviaux pour certains. Le fait que pour une personne donnée, son interprétation de ses problèmes et ses idées de solution sont les plus utiles parce qu’ils s’appliquent à sa réalité semble en effet constituer une idée simple et logique, relevant du bon sens. Pourtant, ceux qui croient en la supériorité du jugement des psychologues, psychanalystes et autres « psys », ont tendance à penser que rien ne vaut l’interprétation du problème par le professionnel. Ce dernier aura une lecture plus pointue qu’un simple mortel, et des conseils avisés à partager.
Si le professionnel a raison, alors pourquoi tous les professionnels ne sont-ils pas d’accord entre eux ? Une célèbre étude sur des pseudo patients a même montré que pour des symptômes identiques, le diagnostic peut être différent selon le psychiatre consulté.
Voici une anecdote qui montre comment, après avoir été formée à l’approche orientée vers la solution, je suis devenue intimement convaincue de sa supériorité.
Je participais à une « intervision » avec des collègues alors que je travaillais dans le secteur de l’insertion socio professionnelle. Il s’agissait d’une réunion o? les collègues partageaient leurs expériences, par exemple en faisant des études de cas. Chacun pouvait partager ses difficultés (dans la limite du temps imparti et sans nommer les patients), et espérer se sentir soulagé et/ou soutenu par l’écoute des collègues, puis éventuellement par leurs conseils. Je partageais donc une difficulté par rapport à une cliente, comme nous avions suivi une formation à l’AOS en équipe, mes collègues parvenaient à garder leurs bonnes idées pour eux, et attendaient de voir si j’avais envie de les recevoir ou si j’en trouvais de meilleures par moi-même.
Après m’avoir laissée exposer mon problème et les solutions tentées, la collègue qui coordonnait la réunion (chacun assumait ce rôle à son tour) me dit alors : « Sarah, y a-t-il quelque chose que tu pourrais faire avec cette cliente et que tu n’as pas encore essayé ? ». A ce moment, après un court silence, j’ai senti s’ouvrir en moi quelque chose comme un espace. Comme si mes pensées, telle une eau stagnante, s’étaient soudain éclaircies par l’effet d’une écluse qu’on ouvre. Un barrage lâchait et une idée m’est venue sans efforts. Ce n’était pas une idée révolutionnaire, juste une idée logique, un exercice que je connaissais bien et auquel je n’avais pas pensé, à proposer à cette personne et qui avait tout son sens au stade d’accompagnement où j’étais avec elle.
Intellectuellement j’avais déjà bien compris le principe de l’AOS, mais cette anecdote m’a fait ressentir l’ouverture, la confiance que l’on peut avoir en soi lorsqu’une personne nous pose une question qui sous-entend qu’elle croit en nos capacités à trouver une solution. Cette personne nous offre un espace et un temps, même court où, au lieu de penser « j’en ai marre, je ne trouve pas de solution », on pense soudain « on croit en moi, je suis capable de trouver ce que je pourrais faire ».